
Mis à jour le 26 novembre 2018
| Chili , sports et loisirs , Voyageur
Publié le 23 juin 2012
David Lefèvre vient de voir son ouvrage Aux Quatre vents de la Patagonie publié chez Transboréal. Il y parle de son périple en Patagonie, entre voyage du bout du monde et enquête historique. Interview.
Je suis David Lefévre, un enfant amoureux de cartes et d’estampes. J’ai interrompu mes études à l’âge de 20 ans pour empoigner mon sac et vivre pendant plus de dix ans une vie de voyages entrecoupée d’épisodes sédentaires dans divers pays pour y recharger le porte-monnaie.
Il y a deux ans et demi, j’ai décidé de m’arrêter sur l’île de Chiloé, au Chili, pour y mener une nouvelle expérience, davantage livré à moi-même, afin de vivre en harmonie avec le milieu naturel, de me retrousser les manches afin de voir de quoi mes deux mains étaient capables…
J’habite dans une cabane, au bord d’un lac, dans une des parties les plus sauvages de l’île. Je n’ai ni eau courante ni électricité. La nature qui m’entoure est magnifique et la vie rustique que je mène là-bas répond à mon besoin d’authenticité et de simplicité.
Chiloé est une île où les saisons sont assez marquées. Elle vous apprend à vivre à leur rythme. Le climat y règle l’écoulement de la vie, il décide de vos activités. Je ne suis pas un adepte des îles à cocotiers. J’ai plutôt besoin de sentir la puissance des éléments autour de moi : le vent, les tempêtes, la course des nuages et leurs couleurs sans cesse renouvelées.
Il démarre réellement dans la Bibliothèque nationale de Santiago du Chili, à la fois comme une quête et une enquête. Les histoires que je découvre dans les archives, notamment des aventures humaines qui sont pour moi de véritables pépites, vont décider en partie de la suite de mon parcours. J’ai suivi, entre autres, les traces de Sarmiento de Gamboa, conquistador méconnu, qui en 1584 a organisé la première tentative de colonisation du détroit de Magellan.
Ensuite, pendant 18 mois, je me suis laisser aller à une lente descente vers la Terre de Feu, de part et d’autre de la cordillère des Andes, au cœur de ce que j’appelle les deux Patagonies : le sud du Chili avec ses canaux, ses forêts denses et ses innombrables cours d’eau ; et le sud de l’Argentine, sec et arasé, avec ses solitudes infinies et ses horizons sans bornes. Ce périple se clôt à l’entrée du détroit de Magellan, sous le phare du célèbre cap des Vierges.
Au cours de mes séjours en Patagonie, mes carnets de notes se sont rapidement étoffés. Mes écrits se sont enrichis de témoignages, de réflexions plus profondes, de portraits plus larges, d’esquisses sociales, d’actualité… Mon manuscrit, après quatre ans de travail, était devenu plus qu’un récit de voyage. J’ai désiré le voir publié pour partager ces nombreuses dimensions, en espérant qu’il devienne une des références sur cette partie du monde.
Je pense qu’après des années de voyage en Asie, attiré par les grands espaces et les peuples qui les habitent, la Patagonie devait inévitablement se trouver sur ma route. Cette partie du monde, y compris la Terre de Feu, comporte mille lieux où s’égarer, où des gens vivent loin de tout et semblent tenir sur leur bout de terre contre vents et marées.
J’y ai trouvé des forêts denses arrosées de cours d’eau qui correspondent à une sorte d’idéal géographique et j’aime la vie simple que les gens mènent sur ces marges de l’Amérique.
Si je devais citer une des personnes qui m’a le plus marqué, j’évoquerais Carlos Vega, éditeur à Punta Arenas. Il fait partie de ceux auxquels la dictature de Pinochet a tenté de faire payer leurs convictions au prix fort. Il se bat vaillamment contre une histoire officielle qui occulte ses vilénies et encense les grands propriétaires terriens au mépris des révoltes ouvrières et des massacres des Tehuelches ou des Fuégiens.
La plus mauvaise rencontre c’est certainement celle de ce condor en Terre de Feu qui me reproche de m’approcher trop près de sa couvée. Il a fondu droit sur moi pour me faire comprendre que je venais de pénétrer son territoire. Après avoir joué l’intimidation, il revenait à l’assaut, chaque fois plus menaçant, en interrompant son piqué au dernier moment et reprenant son élan sur un nouveau courant thermique. J’ai du finalement plonger dans un ravin, semelles fumantes et je n’ai jamais su s’il comptait me crever les yeux comme les rapaces le font aux moutons !
Santiago ou Buenos Aires sont des destinations onéreuses parce que les lignes aériennes sont peu nombreuses et les vols vites surchargés. Un billet d’avion dévore rapidement le budget. Pour le reste, organiser son propre voyage, une fois sur place, est assez facile en Patagonie et évidemment plus abordable. Hormis les grands carrefours touristiques situés à proximité des panoramas incontournables accessibles par route, mais qui se monnaient au prix fort, il y a de nombreux endroits qui tendent les bras à celui qui est prêt à faire un pas de côté.
Les cartes précises sont quasi inexistante car elle sont la propriété des Instituto Geografico Militar. Il faut donc être habitué à marcher en autonomie avec un bagage léger et savoir se guider suivant l’orientation des cours d’eau, l’accentuation des reliefs.
Une contrée née de l’imaginaire des hommes et qui continue de fasciner à travers le temps. Un territoire sans bornes, au climat rude, des vents retors, des paysages à couper le souffle.
Je réélabore mes carnets beaucoup plus tard, une fois posé quelque part. Mes notes sont brèves et condensées, elles servent de points d’appui à la mémoire. À la manière d’instantanés photographiques. J’y concentre l’essentiel afin que, à la relecture, et au moment de les retravailler, les événements évoqués se remettent en ordre d’eux-mêmes.
Reste ensuite le défi du style, de la légèreté, le souci d’emmener le lecteur à mes côtés… Vient alors le moment de se livrer à une sorte de combat avec les mots. Ce livre s’est écrit en grande partie dans ma cabane sur de grandes rames de papier. Lorsque je me rendais dans la ville la plus proche, à plus de 50 km, j’allais à la bibliothèque et je recopiais sur un ordinateur.
Mon séjour en France va se prolonger au-delà des quelques mois prévus pour accompagner « Aux quatre vents de la Patagonie ». Les éditions Transboreal vont publier en novembre prochain le récit de ma vie actuelle sur Chiloé, sous le titre de « Solitudes australes ». Ce sera un livre tourné vers la nature, la contemplation, les émotions, dans la lignée du nature writing nord-américain, genre pour lequel nous n’avons pas d’équivalent dans la langue française. Viendra ensuite ce petit essai sur la vie en cabane, en forme d’éloge à la vie frugale.
Apparemment le glacier anvace de 2 me8tres par jour! C’est pour e7a que des gros blocs de glace tombent re9gulie8rement dans le lac. Et la face qui de9passe de l’eau mesure 60m de haut mais il y a encore 120m SOUS l’eau, c’est e9norme!En ce moment c’est le printemps, il fait entre 3 et 15 b0C, mais vers le glacier il fait un peu plus froid car une telle masse de glace refroidit l’air autour. Je ne sais pas quelle tempe9rature il fait en hiver et en e9te9 mais en hiver, avec la neige, les routes peuvent eatre ferme9es.Bisous
François
le 1 août 2012 :
Un autre – très beau – livre sur l’Amérique du Sud, Dernières nouvelles du Sud, du génial Luis Sepulveda, associé au photographe Daniel Mordzinski, aux éditions Métailié