Pixel Facebook

Le meilleur de nos guides
Les conseils des blogueurs voyage
Votre itinéraire et votre voyage sur mesure

Actus voyage > Isabelle Tréhorel : le voyage immobile
Isabelle Tréhorel : le voyage immobile

Isabelle Tréhorel : le voyage immobile

Mis à jour le 26 novembre 2018 | , , , ,
Publié le 5 juin 2011

Au-dessus de la porte, une pancarte écrite en plusieurs langues annonce la couleur : ici, pas de nombrilisme, on préfère se tourner vers l’ailleurs. Surtout quand il est imprimé. Il suffit alors d’ouvrir une page et nous voici partis. Dans la librairie rennaise d’Isabelle et Hervé, pas de frontières. En tout cas, pas entre les genres. Et encore moins entre les pays. Romans, théâtre, poésie. Russie, Palestine, Suède, Uruguay, etc. Un tour du monde littéraire, sur 30m2. C’est fou comme on peut voyager, dans un si petit espace…

Votre librairie s’appelle Greenwich. Ce nom, c’est un premier pas vers le voyage…

Le méridien de Greenwich donne l’heure universelle, mais c’est aussi le nom d’un quartier de New York, Greenwich Village. Le Village a traditionnellement été le point central de nouveaux mouvements politiques, artistiques ou culturels. Dans les années 50, voulant échapper à un conformisme social, nombre d’écrivains, de poètes, d’artistes et d’étudiants en quête de liberté s’installèrent à Greenwich Village. C’est l’idée de la librairie : être un lieu propice à la découverte et à la circulation des idées.

Vous vous consacrez en grande partie à la littérature contemporaine étrangère. La littérature française ne vous suffit pas ?!

Nous avons créé la librairie qui nous manquait. Il nous était facile de trouver de la – bien souvent mauvaise – littérature française, mais pour le domaine étranger, mis à part les Anglo-saxons, impossible de trouver une sélection digne de ce nom en littérature contemporaine africaine, d’Europe centrale ou du Moyen-Orient par exemple… Et pourtant le monde littéraire est vaste et riche de mille chefs-d’œuvre.

Lire des auteurs étrangers, c’est une manière de voyager un peu, non ?

Lire, c’est voyager immobile. Vous pouvez en quelques jours et pour quelques euros parcourir des milliers de kilomètres, vivre plusieurs vies, arpenter différents univers géographiques ou intimes. En bons Bretons, à travers nos lectures nous partons explorer d’autres mondes pour les partager avec d’autres curieux. Des gens de toutes les nationalités sont entrés à la librairie, souvent pour faire découvrir à leurs hôtes français un auteur de leur pays qu’ils aiment particulièrement, c’est l’occasion de rencontres stimulantes.

Mais que trouvez-vous chez les auteurs étrangers que vous n’avez pas chez les auteurs français ?

Force est de constater qu’il y a plus d’auteurs étrangers contemporains tournés vers le monde et qui s’attachent à nous le raconter. En France, il y a peu de rubriques littéraires dans les médias et ce sont toujours les mêmes deux ou trois écrivains, toujours français, qui viennent vendre le même bouquin qui raconte toujours la même histoire, souvent celle de leur nombril. Ça n’a pas toujours été le cas, il y a eu des Joseph Kessel, des Romain Gary et beaucoup d’autres, mais c’était il y a longtemps. Il y en a aussi aujourd’hui, mais ce sont des exceptions.

A travers les livres que vous lisez, d’un pays à l’autre, voyez-vous une différence dans la manière de voir et de raconter le monde ?

Il y a effectivement différents abords du monde selon les cultures ou les auteurs. C’est tout l’intérêt de la rencontre avec l’autre, cela permet de voir le monde par un autre prisme que le sien, cela ouvre d’autres horizons. C’est aussi tout l’intérêt de la traduction qui permet de faire passer des concepts nouveaux d’une culture à une autre et de ce fait de l’enrichir. Il est aussi passionnant de découvrir ce qui nous relie malgré nos différences, nous ressentons tous l’espoir, le chagrin, l’amour, l’injustice, la colère… C’est sans doute ça, l’universel.

Il y a aussi les écrivains voyageurs. C’est encore une autre manière de raconter le monde. Certains ont-ils vos faveurs ?

J’aime plus les écrivains qui voyagent que les voyageurs qui écrivent. Depuis mon enfance, je lis avec un plaisir toujours renouvelé Jack London dont j’aime tous les livres, mais plus particulièrement Martin Eden et Le vagabond des étoiles. Nicolas Bouvier me touche par sa liberté et son audace littéraire. J’apprécie aussi Kenneth Withe pour sa poésie et parce qu’il aime Henry David Thoreau et la Bretagne.

Parmi tous ces livres, dressez-nous la liste de vos coups de cœur…

– Tarun Tejpal (Inde), Histoire de mes assassins, Éd.Points
– Akira Ysohimura (Japon), Naufrages, Éd. Babel
– Chimamanda Ngosie Adichie (Nigéria), L’autre moitié du soleil, Éd. Folio
– Gao Zing Jian (Chine), La montagne de l’âme, Éd. Points
– Philippe Roth (USA), Indignation, Éd. Gallimard
– Zoya Pirzad (Iran), Un jour avant Pâques, Éd. Zulma
– Mahmoud Darwich (Palestine), Anthologie (1992-2005), Éd. Babel

Et votre prochain voyage, ce sera où ?

J’espère aller chez des amis à Marseille cet été. J’aime cette ville magnifique et changeante : les immeubles Haussmaniens de la Cannebière évoquent Paris, le quartier du Panier est une petite Italie, c’est un peu l’Algérie à Belsunce, tout ça en quelques mètres. À Marseille, on est ici et là-bas et ça me plaît.

Pour ceux qui veulent prolonger la conversation avec Isabelle Tréhorel, poussez donc la porte de sa librairie, à Rennes : Librairie Greenwich, 1, rue Jean Jaurès (Tél. : 02 99 78 34 90) – librairiegreenwich@free.fr.

Et pour approfondir le voyage ou rencontrer des auteurs d’ici ou d’ailleurs, allez donc jusqu’à Saint-Malo entre les 11 et 13 juin, pour le Festival international, du livre et du film Etonnants Voyageurs : www.etonnants-voyageurs.com.


Laissez un commentaire