
Comptoirs à l’ancienne, tables de marbre, boiseries patinées par les années, boissons chaudes couronnées de chantilly… Le temps semble s’être arrêté au XIXe s. dans les cafés viennois. S’y croisent hommes d’affaire, couples d’amoureux, amis de longue date. Un art de vivre donc, que l’UNESCO a inscrit à son patrimoine culturel, et qui se perpétue et se renouvelle avec la création d’établissements contemporains. Venez, on vous emmène !
Il faut remonter jusqu’en 1683, date du siège de Vienne par l’Empire Ottoman : les Turcs, battant retraite, abandonnent des sacs de grains de café, considérés à l’époque sans valeur. L’Arménien Johannes Diodato, espion pour la cour sous couverture d’homme d’affaires, négocie en 1685 le droit exclusif de « préparer sous forme de café le breuvage turc » dans son établissement. Succès immédiat ! Peu à peu, les maisons de cafés s’inscrivent dans le quotidien de la ville. On y vient lire, trouver l’inspiration, conclure des contrats ou parler philosophie. Freud, Klimt, Schiele, Kokoschka, Karl Kraus, Elias Canetti, Trotski les fréquentent couramment… Vous n’aurez que l’embarras du choix : la ville en compte plus de mille !
Oubliez les zincs parisiens et les petits noirs bus à la volée : le café viennois se savoure lentement, avec délice. Les plus classiques restent le Melange, composé à part égale de café et de mousse de lait, saupoudré de copeaux de chocolat, et le Kaffee mit Schlag servi avec de la crème fouettée, voire l’Einspanner, l’équivalent façon moka. Viennent ensuite les compositions décadentes : le Kaisermelange (expresso, jaune d’œuf, miel et cognac) ou le Maria Theresia (en honneur à l’impératrice, café et liqueur d’orange), pour n’en nommer que quelques-unes. Dernière tradition, celle du double K : Kaffe-Kuchen ou café accompagné d’une pâtisserie. Apfel Strudel, Sacher Torte… Toute résistance est inutile.
Les adresses mythiques sont nombreuses. Commencez par le Café Central, au cœur exact de la ville : Trotsky, Freud, Loos faisaient partie des habitués. Imaginez donc ses plafonds voûtés, ses colonnes de marbre, son élégant comptoir de pâtisseries du temps où l’on venait y jouer aux échecs et fumer un cigare ! Tout près se trouve Demel, ancien pâtissier impérial et grand favori de Sissi. Le personnel y est entièrement féminin, une tradition qui a plus de 200 ans… Profitez-en pour découvrir les anciens moules et décorations au musée de l’étage. Puis direction le Sacher Café, où fut inventée la fameuse Sacher Torte, un gâteau au chocolat moelleux rehaussé de confiture d’abricot. Inégalable.
Les concerts de musique classique font aussi partie du charme des cafés viennois. C’est, après tout, la ville idéale pour redécouvrir les compositions de Mozart ! Laissez-vous envoûter par les pianistes du Schwarzenberg (l’un des plus anciens cafés de Vienne), du Prückel (le QG des journalistes) ou du Landtmann (qu’adorait Marlene Dietrich). Au Bräunerhof, on savourera son Melange en écoutant un trio violon-violoncelle-piano, tandis que le Weimar vibre au son d’opérettes, de swing et de jazz.
À Vienne, établissements traditionnels et modernes cohabitent à la perfection. Les premiers offrent une parenthèse hors du temps, presque rassurante dans un monde toujours en mouvement. Les seconds, surnommés Third Wave, mettent en avant non pas l’élégance d’un service mais une expertise hors pair. On y vient savourer des cafés de petits producteurs, parfois torréfiés sur place, découvrir des méthodes d’infusion pointues (Chemex, Aeropress, cold brew), admirer les baristas décorer la mousse des latte… Vous êtes tentés ? Laissez donc Kaffemik, Balthasar, People On Caffeine, Waldemar vous enchanter.
Vous l’aurez compris, à Vienne, on valse d’un café à l’autre ! À chacun son atmosphère. Tenez, à Das Mobel, par exemple, tout est à vendre : même le siège sur lequel vous êtes assis. On en aimerait presque les jours de pluie…
Vienne
9.90 €
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